Appel à contributions : "L'expérience Caravage"
D
e nombreux ouvrages et articles d’historiens de l’art ont récemment enrichi et renouvelé notre compréhension de l’œuvre de Michelangelo Merisi sur les plans historique mais aussi technique et iconographique. Toutes ces études ont aussi permis de faire progresser notre savoir du contexte culturel et artistique de la première modernité, contexte que le peintre lombard a contribué à transformer au tournant des années 1600 en proposant un art nouveau de la composition et de la mise en tableau et un « naturalisme spéculaire » (Ch. Dempsey) qui a essaimé partout en Europe dans la première moitié du XVIIe siècle.
Faisant fond sur ce renouveau des études caravagiennes, ce numéro spécial du Journal of Early Modern Studies voudrait interroger un aspect singulier de la peinture du Caravage, à savoir son effet sur le regardant ou la regardante, l’expérience subjective que fait celui-ci ou celle-ci en contemplant l’image – ce que l’on se propose d’appeler l’expérience Caravage. À la fois personnelle et intime, une telle expérience est souvent décrite en termes d’attraction et de fascination, de sollicitation et de choc, de contact et de présence physique, comme si les peintures du Caravage avaient une emprise sur le spectateur, le forçant d’une manière ou d’une autre à se mettre en lien avec la scène représentée. De D. Freedberg à M. Fried, nombreux sont les spécialistes qui ont mis l’accent sur cet aspect de l’expérience Caravage, mais il reste à lui donner sens, en s’appuyant notamment sur les récentes avancées de la recherche. Peut-on déterminer les causes formelles, techniques ou dramaturgiques de ce phénomène ? Que se passe-t-il exactement entre le tableau et le spectateur qui se trouve appelé et en quelque sorte happé par l’image ? Comment cette expérience varie-t-elle d’un tableau à l’autre, ou d’un thème pictural à l’autre ? Quelle place occupe la dimension religieuse et spirituelle dans cette affaire? À l’évidence, conduire une réflexion sur la face subjective de l’expérience nécessitera de porter une attention toute particulière à la question historique de la réception esthétique. Cette expérience Caravage est-elle seulement la nôtre ou bien est-elle quelque chose de commun avec les contemporains du peintre ? L’effet particulier de ces images n’est-il que le fruit d’un point de vue particulier ou appartient-il à l’image caravagienne en tant que telle ? Comment une telle expérience a-t-elle préparée ou préfigurée par les peintres antérieurs, que ce soit en Italie ou en Flandres ? Dans quelle mesure cette expérience se retrouve-t-elle chez les caravagesques du XVIIe siècle ?
Les articles, en anglais ou en français, pourront consister en un commentaire d’une œuvre ou d’un groupe d’œuvres du Caravage, en l’exploration d’un thème ou d’un motif pictural particulier, en une étude plus large considérant le Caravage et sa réception au sein de la première modernité, ou en tout autre type d’approche susceptible mettre en lumière la relation entre la peinture du Caravage et le spectateur. Les contributeur-trices sont invité-e-s à privilégier une approche interdisciplinaire et à faire droit à la pluralité des paradigmes interprétatifs ainsi qu’aux contextes techniques, historiques et culturels pertinents.
Date-limite: 1er mars 2023
Lieu de publication
Journal of Early Modern Studies (Zeta Books), à paraître à l'automne 2023.
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